Floué par les bandits au Bangladesh qui sont venus le jeter au Mali au lieu de l’Italie promise, Mohamed Salahouddin n’a perdu l’espoir.
Seul, loin du soutien de ses siens et motivé par la galère de sa famille paternelle, il s’est battu d’abord pour s’assurer une survie à Bamako, puis monté son propre business dans le domaine vestimentaire et du coton.
D’ouvrier maçon à gardien de maison en passant par le vendeur de cigarette, il a travaillé dur pour être aujourd’hui le patron d’une gigantesque boutique de vêtements et d’objets de parures dans le quartier de Baco-Djicoroni Golf dénommée « Style Shop » devenue un lieu de visite par excellence de tous les grands patrons de la ville de Bamako.
Mieux, Mohamed Salahouddin, il est aussi devenu un hôte pour tous les Bangladais en séjour au Mali. Il est actuellement à la tête de l’association des ressortissants du Bangladesh vivant au Mali qui œuvre activement à nouer des relations économiques fructueuses entre le Mali et le Bangladesh.
Dans cet article, Mohamed Salahouddin explique son histoire pleine de leçons pour tous les jeunes maliens, qui croient à tort, qu’on ne peut pas rester au Mali et réussir.
« Je suis venu au Mali par accident. Je me suis fait escroquer par des bandits dans mon pays à qui j’ai donné plusieurs millions pour m’amener en Italie. Il y a de cela plus de 20 ans. Pour partir en Italie, j’ai du, avec le consentement de ma famille, vendre la maison paternelle. Et au lieu de l’Italie, les escrocs m’ont conduit au Mali avant de disparaître dans la nature. Je me rappelle encore j’ai passé ma première nuit au Mali sous un arbre près de la mosquée de l’Imam Cheick Diarra à Kalaban-Coro. C’est ce dernier qui est devenu, par la suite, mon père adoptif à Bamako en acceptant de me faire loger. J’avais honte de retourner chez moi pour éviter la déception de mes parents. Pire que cela, je n’avais pas un rond pour y retourner. Alors la seule chose qui me restait était de rester au Mali pour me battre. Et c’est ce que j’ai fait », explique Mohamed les yeux rougis par ces mauvais souvenirs.
C’est ainsi que l’aventure malienne commence pour le Bangladais Mohamed Salahouddin. Il prend son courage à deux mains et accepte de faire toute sorte de travail. Il n’avait pas beaucoup de choix. « Se battre ou périr à l’étranger, je n’avais que ces deux options », dit le Bangladais avec un sourire sec aux lèvres.
Il a commencé par être un ouvrier maçon, puis devient un chargeur de camion avant de se faire recruter par un promoteur de Cyber Café à Baco-Djicoroni.
Là-bas, il eut l’idée d’installer, parallèlement à son travail, une table de vente de cigarette. « Petit à petit, j’ai monté son propre business. Mais avant de me résigner à rester au Mali, j’ai tenté d’aller en Algérie où je me suis fait arrêter à la frontière et emprisonner pendant trois mois. Notre convoi avait été pris par les forces de sécurité algériennes comme des terroristes.
Ce n’est qu’à mon retour de l’Algérie que j’ai décidé de ne plus aller ailleurs et de rester définitivement à Bamako pour travailler dur et réussir. Aujourd’hui, je dis Dieu merci, et merci à mes parents pour leurs bénédictions. Je suis actuellement le promoteur d’une entreprise appelée « Salahouddin-Global Service ». C’est une entreprise multiservices. Avec cette société, j’ai ouvert deux grosses boutiques de vente de vêtements qui marchent très bien. En plus, avec cette entreprise, j’ai aidé à la vente du coton malien au Bangladesh. Je suis aussi le président de l’association des ressortissants du Bangladesh au Mali qui regroupe plus 4000 personnes y compris les casques bleus de la Minusma de nationalité bangladaise.
Grâce à cette association, nous essayons d’établir une relation économique fructueuse entre le Mali et le Bangladesh. Sans compter, cette association a également fait beaucoup de dons aux orphelinats de Bamako en mémoire de toute la souffrance que j’ai vécue au Mali. Tout récemment, j’ai personnellement parrainé une nuit de paix organisée par l’Espace Songhoy en contribution à la paix au Mali, mon pays adoptif. Je me suis marié au Mali avec une malienne et nous avons eu des enfants. Je signale aussi que c’est grâce au Mali que la Minusma, par le canal d’un Colonel Bangladais, m’a envoyée avec toute ma famille visiter mes parents au Bangladesh.
J’ai aussi pu réaliser son rêve d’aller en Europe. Etant au Mali, j’ai voyagé en France où j’ai rencontré l’Ambassadeur du Bangladesh. Bref, le Mali m’a tout donné. Le Mali est mon Italie », a dit Mohamed très satisfait de rester au Mali lorsque nous l’avons rencontré dans sa boutique de vêtements sise à Baco-Djicoroni Golf avant d’arriver à la pâtisserie Papito et après Fitini Marcket.
Aujourd’hui, Mohamed Salahouddin rêve d’être le consul du Bangladesh au Mali.
Via invetirmali.com
Youssouf Z KEITA